Feu, Maria Pourchet (Selection du Prix summer de Bron, 2021)

Maria Pourchet a le sens de la formule, de celles qui englobent tout. FEU est un laboratoire de langage, un terrain de jeux amoureux fragile et mouvant où les hommes et les mots qu’ils portent, qui les portent, se perdent...

Récit désabusé d’une rencontre, les amants se croisent et se touchent dans leurs solitudes et dans leurs vérités profondes sans parvenir à se le dire ni à s'aimer réellement, sans parvenir à sortir des carcans qui les déterminent. Maria Pourchet n’aborde pas seulement la passion ici, elle raconte tout ce qui lui est intrinsèquement lié, ce qui se joue de non-dits quand des fragilités s’entrechoquent.

Elle montre aussi, en creux, la fatalité dont il faudrait pouvoir sortir, parce qu’il faudrait si peu pour réussir, pour être libres, pour abandonner ce qui préexiste, si cela était possible…


Alors, FEU devient le miroir de l’inassouvissable désir, de ce vers quoi l’être tend et de cette porte qu’il ne franchit jamais. Dans une langue vive qui déglingue tout sur son passage, l’auteure saisit l’ironie de la vie des hommes qui n’habitent qu’à moitié le monde, qui donnent le change. Pris au piège, les personnages composent, se frôlent, s’aiment et inlassablement se croisent. Puis, fuient. Affronter leurs ombres est intenable, les rôles sont trop ancrés, la peur paralysante. Tout est là, en germe, prêt à s’embraser puis à périr comme dans les grandes tragédies grecques. La machine infernale qui nous tient haletants et d’où nous parviennent, tels des fantômes, les voix des génitrices qui les ont façonnés est en route.


Et sous les décombres, des mots, des remparts, des formules sur l'absurdité de la vie, ses inepties, sa fragilité. Malgré l'épreuve que ça peut être de se laisser embarquer par l'écriture sans répit de Maria Pourchet, ce qui rend ce livre fort, tristement beau, ce sont les êtres qu'elle met en scène. Imparfaits à souhait. Humains.

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